
C’est sur son site Regard|B, et ce depuis plusieurs années, qu’Elodie Bernard partage et diffuse avec intelligence l’art contemporain à un public de plus en plus nombreux. La jeune commissaire d’exposition multiplie avec succès projets personnels et collaborations prestigieuses, dont la liste ne cesse de s’allonger.
A l’occasion d’une visite de Bruxelles, mêlant lieux de culture populaire, frites et art contemporain, nous avons réalisé le portrait d’Elodie, dont la sélection curatoriale s’annonce d’ores et déjà prometteuse.
D’où vous vient cette passion pour l’art ?
Elle prend certainement ses racines dans ma jeunesse, même si je ne viens pas d’une famille où l’art était très présent, j’ai fait de nombreuses expériences qui ont éveillé, nourri et développé ma sensibilité. D’ailleurs je continue de faire grandir cette sensibilité à chaque visite d’exposition et d’atelier, à chaque lecture, concert, film ou encore pièce de théâtre auxquels j’assiste.

Quel est votre parcours ?
Je suis diplômée d’un Master en Art. J’ai poursuivi ma formation par un an d’étude à la Tartu Korgem Kunstikull en Estonie. C’est durant cette année d’étude en école d’art que j’ai réalisé que pratiquer, produire des pièces ne m’intéressait pas. Je préférais présenter les travaux des étudiants qui étaient dans ma promo. C’est d’ailleurs en Estonie que j’ai réalisé mes premiers commissariats d’expositions. Depuis 2015, j’écris des textes pour les diffuser sur mon site Regardb.com, mais aussi pour des lieux d’expositions, des artistes ou encore des magazines. Je m’intéresse essentiellement à la création émergente.
Quelles sont les rencontres importantes qui croiseront votre chemin ?
Toutes ! Je pense sincèrement que chaque rencontre est importante. Chacune, à son échelle, est enrichissante et constructive. Autant dans un petit espace d’art en région que lors de grandes foires internationales.

Votre site Regard|B est-il en quelque sorte la synthèse de votre histoire ?
Où peut-être son commencement! J’ai travaillé dessus durant un an avant de le mettre en ligne en 2015. L’idée de Regard|B était d’abord de parler simplement des expositions que je visitais en gardant l’aspect critique, c’est-à-dire, faire un vrai choix d’expositions, d’œuvres, d’artistes à défendre et promouvoir. C’est aussi une autre façon de donner envie aux lecteurs d’aller voir les expositions. Aujourd’hui, c’est un peu plus, ça me permet de regrouper, en plus du contenu habituel, mon travail personnel en tant que commissaire et chroniqueuse.
De futurs projets que vous aimeriez partager ?
Oui, il y en a plusieurs et notamment un qui me tient vraiment à cœur. C’est Living Cube. Il s’agit d’une exposition/vente privée dans le salon de mon appartement. Le concept n’est pas nouveau, mais il me permet à mon échelle et à Orléans de présenter et vendre des œuvres d’artistes dont le travail est prometteur et me touche particulièrement. Avec Living Cube, le rapport à l’œuvre est différent, plus proche. On les appréhende dans un cadre plus intime que l’univers de la galerie. Les pièces sont présentées dans mon espace quotidien, on se projette plus facilement. Et puis j’aime les échanges que ce genre de projet favorise. C’est un vrai délice!

La dernière exposition qui vous a marquée ?
Shut the Fuck Up une exposition qui présentait des œuvres d’Hippolyte Hentgen en regard d’une vidéo bien connu de General Idea dans l’espace d’art La Box à Bourges, en région Centre. Dans cette vidéo de 1985, le groupe reprend des extraits de films de fictions, documentaires ou performatifs alternés avec des passages où ils interviennent directement face caméra. C’est à partir de cette œuvre que le duo Hippolyte Hentgen a composé et présenté de très belles tapisseries suspendues dans tout l’espace et quelques grands dessins. J’ai adoré la façon dont les deux questionnent la relation aux médias et l’impact que cela peut avoir sur la création.
Expliquez-nous la ligne de votre sélection curatoriale pour La peau de l’ours.
Pour cette première collaboration, j’ai choisi de présenter le travail de trois jeunes artistes français dont je suis le travail depuis quelques années déjà. Chacune de leur démarche artistique embrasse tout ce que j’aime dans la création contemporaine. Gwendoline Perrigueux, jeune artiste parisienne, réalise des sculptures qui sont comme une explosion d’ondes positives. Mais ce qui m’interpelle le plus c’est le côté aussi brut que sensuel que dégagent ses œuvres. Julie Susset, jeune peintre installée dans le sud de la France, met en image des paysages qu’elle s’invente, dans des peintures toujours très colorées dans un geste chargé d’expressivité. Et pour conclure cette première sélection, Antoine Goudard, jeune artiste français installé en Suisse depuis quelques années, dont le travail réinvente complètement la façon d’aborder les questions d’identité, de rapport au corps et à ses transformations, dans une pratique délibérément délicate et minimale, un vrai bijou!
Photos : Miles Fischler
